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sinistre en responsabilité civile professionnelle
 


 
LE SECRET PROFESSIONNEL


RETOUR D'EXPÉRIENCE D'UN CORRESPONDANT RÉGIONAL INFORES


Je suis devenu correspondant régional Infores sur la région Poitou Charentes Vendée il y a 1 an environ. Mon bilan de cette expérience peut être résumé en 4 points :


  • Le nombre de consultations

Le nombre de consultations des confrères/consœurs n'est pas exorbitant : j’ai eu à répondre à une dizaine de questions environ sur l'année 2017. Cela est a priori plutôt rassurant. Cela est également conforme aux statistiques nationales de sinistralité qui sont stables depuis 10 ans. Ce sont souvent des demandes de renseignements préalables et non pas des mises en cause directes.


  • Votre couverture d'assurance

Vous avez à mon sens plutôt intérêt à être assuré via le contrat groupe de la profession. Celui-ci couvre par nature l'ensemble des missions autorisées par nos règles professionnelles. Les montants assurés sont ajustés dans le temps. Les garanties sont collectivement discutées et adaptées périodiquement, entre l'Ordre et la compagnie d'assurance. A défaut, assurez-vous auprès de votre compagnie que l’ensemble des missions réalisées par votre cabinet est bien inclus dans le périmètre des travaux garantis par votre contrat.


  • Vos correspondants régionaux

En cas de difficulté au plan régional, vous avez la possibilité de solliciter un correspondant Infores d'une autre région. Cela vous est loisible si vos liens avec votre interlocuteur régional sont trop distants (ou trop proches) et ne vous permettent pas de lui parler en toute transparence-confiance.


  • Questions fréquentes

Les questions les plus fréquentes ont trait au secret professionnel, le plus souvent à l'occasion de documents demandés à l'expert-comptable par une autorité publique ou judiciaire. Ce point nécessite à mon sens un éclairage particulier. Car tous les cas n’ont pas été tranchés par la jurisprudence et font encore l'objet de débats sur le plan pratique et juridique.



FOCUS SUR LE SECRET PROFESSIONNEL :


Comme indiqué ci-dessus, des autorités publiques ou judiciaires sollicitent les experts-comptables pour réunir des informations sur des clients ou anciens clients. Citons par exemple :

  • Réquisition à personne par courrier émanant d’un officier de police judiciaire pour connaître la nature des travaux comptables produits et la copie d’états et pièces comptables détenus par le cabinet.
  • Appel téléphonique d’un OPJ pour solliciter une audition concernant un client ou un ex-client du cabinet.
  • Visite inopinée d’un contrôleur de la DGCCRF pour consulter et prendre copie de pièces comptables d'un client.
  • Visite d’un contrôleur de l’URSSAF sollicitant la communication de bulletins de payes produits par le cabinet, etc...


UN ARTICLE PARU DANS LA REVUE SIC DE JANVIER 2017 FAIT UN POINT SUR LA QUESTION DU SECRET PROFESSIONNEL ET INDIQUE NOTAMMENT:

  • L'article 21 de l’ordonnance du 19 septembre 1945 dispose que les professionnels de l’expertise comptable sont tenus au secret professionnel dans les conditions et sous les peines fixées par l'article 226-13 du code pénal.
  • L’article 226-13 du Code pénal punit la révélation d’une information à caractère secret par une personne qui en est dépositaire par profession, d’un an d’emprisonnement et de 15 000 euros d’amende.
  • Par ailleurs, l’article 147 du Code de déontologie impose aux professionnels un devoir de discrétion dans l'utilisation de toutes les informations dont ils ont connaissance dans le cadre de leur activité.

Ainsi, ces deux textes, l’un provenant du Code pénal, l’autre du Code de déontologie, prévoient les règles s’imposant aux professionnels de l’expertise comptable.


Certains auteurs faisaient un distinguo entre secret professionnel et devoir de discrétion. La discrétion vise toutes les informations générales, hors celles couvertes par le secret, et que l’expert-comptable et ses collaborateurs ne doivent pas divulguer sans l’accord exprès du client. Par contre, nul ne peut délier le professionnel du secret, pas même le client. Ainsi le secret concerne les échanges, correspondances et informations secrètes, c'est-à-dire celles que l'expert-comptable a été amené à connaître dans le cadre de l'exercice de sa mission et que son client n'aurait pas dévoilé s'il n'avait pas eu confiance en lui et s'il n'avait pas eu besoin de s'expliquer.


En réalité, l’analyse de la jurisprudence conduit à ne pas opérer de distinction pratique entre secret professionnel et devoir de discrétion. Par nature, tout document non public peut relever du secret, y compris des pièces comptables ou les comptes annuels d’un client. Mais, dans certains cas, il est possible de prévoir contractuellement les conditions de transmission d’informations, notamment lorsque cette transmission est inhérente à l’exercice de la mission (envoi de liasses fiscales à la DGFiP, de déclarations sociales,…).


Pour en revenir au secret professionnel prévu à l’article 226-13 du Code pénal, sa levée est possible de manière extrêmement limitée et uniquement dans les cas prévus par un texte de nature légale. En effet l’article 226-14 du Code pénal prévoit que l’article 226-13 n'est pas applicable dans les cas où la loi impose ou autorise la révélation du secret.


En pratique, il importe à chaque fois de s‘interroger si un texte légal impose ou autorise la levée du secret.


Dans ce but, vous trouverez ci-contre une liste, non exhaustive, des dispositions levant le secret professionnel de l’expert-comptable (ou instaurant un droit de communication en faveur d’une administration pouvant être assimilé par la jurisprudence à un cas de levée du secret professionnel).


Plus généralement la problématique du secret professionnel est analysée dans la publication de l’Ordre « Expertise comptable et secret professionnel, édition 2015 ». Une actualisation est prévue pour fin 2017.


Cette publication relate l’ensemble des enjeux du secret professionnel, notamment les personnes concernées, les cas de levée de ce secret, notamment en cas de mise en cause du professionnel pour la défense de ses intérêts. Elle indique également que certaines situations n’ont pas encore fait l’objet à ce jour de jurisprudence.


Ainsi, des positions différentes peuvent être développées par certains avocats. Je vous invite à consulter également d’autres publications à ce sujet, notamment par des avocats spécialisés en ce domaine.


Je vous invite également à remonter vers vos correspondants Infores les cas de figure, questions et solutions, dont vous avez connaissance. De manière à recenser et compléter le partage d’expériences au bénéfice de l’ensemble des professionnels de l’expertise comptable.


  • Article 21 de l’ordonnance de 1945 en cas de mise en cause de la responsabilité disciplinaire et pénale de l’EC ;
  • L 561-21 du Code monétaire et financier entre professionnels du chiffre et/ou du droit sur un client commun dans une même transaction pour s’informer de l’existence d’une déclaration de soupçon ;
  • L 16 B et L 81 du Livre des procédures fiscales pour l’administration fiscale ;
  • L 114-19 du Code de la Sécurité sociale pour les organismes de Sécurité sociale ;
  • L 511-1 et suivants du Code de la consommation pour certains agents de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes ;
  • L 65 du Code des douanes et L 38 LPF pour certains agents des douanes ;
  • L 8271-1 et suivants du Code du travail pour les inspecteurs et contrôleurs du travail (lutte contre le travail illégal) ;
  • L 450-3 et suivants du Code de commerce pour les agents de la DGCCRF et de l’Autorité de la concurrence ;
  • L 621-10 et suivants du Code monétaire et financier pour les enquêteurs de l’AMF ;
  • L 623-2 du Code de commerce pour le juge-commissaire ;
  • L 622-5 du Code de commerce pour l’administrateur judiciaire et le mandataire judiciaire pour les documents et livres comptables ;
  • 77-1-1 du Code de procédure pénale pour OPJ enquête préliminaire, 99-3 pour instruction ;
  • L 561-26 du Code monétaire et financier pour Tracfin.

Jean-Yves MOREAU - Correspondant INGS